Renaud Muselier est Président du Conseil culturel de l’Union pour la Méditerranée (UpM) ; Député français, il est aussi vice-président de la commission des affaires étrangères à l’Assemblée Nationale. Il a été secrétaire d’État aux affaires étrangères de 2002 à 2005 dans le gouvernement de Jean-Pierre Raffarin.
La Lettre Méditerranée :
Vous avez salué la révolution tunisienne dans un communiqué officiel mais – pour l’instant – vous n’émettez aucune appréciation sur la mobilisation anti-Moubarak du peuple égyptien. Ces soulèvements seraient-ils différents pour vous ?
Renaud Muselier :
– « Les évènements qui se déroulent aujourd’hui dans plusieurs pays du bassin méditerranéen et plus particulièrement en Tunisie et en Egypte trouvent leurs racines dans un mouvement profond d’aspiration à davantage de liberté et de démocratie. Ce mouvement est porté le plus souvent par une jeunesse en manque de repère et qui a peur de son avenir… Même si les situations sont différentes, les revendications – légitimes – des peuples qui se soulèvent sont identiques : Plus de démocratie mais aussi des conditions de vie meilleures… et un partage des richesses plus équilibré. »
La Lettre Méditerranée :
« Ennadah » fait son retour en Tunisie, « Les Frères Musulmans » sont très présents dans le soulèvement égyptien. Craignez-vous la poussée d’un Islam radical dans ces pays ?
Renaud Muselier :
-« Cette crainte est réelle. Nous devons être vigilants afin que la désespérance exprimée par les hommes et les femmes qui se révoltent aujourd’hui ne soit pas la porte ouverte à l’émergence de forces islamistes intégristes. Pour éviter ces dangers, il faut replacer au centre les valeurs de liberté, de justice, de tolérance, de respect… Pour faire en sorte que la démocratie triomphe durablement dans ces pays. C’est là que la Culture doit jouer un rôle essentiel, j’en suis convaincu. Car la Culture, en Méditerranée, c’est ce qui nous rapproche. C’est la découverte plutôt que l’enfermement… C’est un pont plutôt qu’une frontière. »
La Lettre Méditerranée :
Zine el-Abidine Benali et Hosni Moubarak étaient des piliers de l’Union pour la Méditerranée. Sans eux, le fonctionnement de l’institution est-il menacé ?
Renaud Muselier :
– » 43 états de l’Europe et du bassin méditerranéen ont choisi de bâtir ensemble un projet ambitieux. Les évènements qui se déroulent en Tunisie et en Egypte, les troubles dans d’autres pays du bassin méditerranéen rendent encore plus nécessaire cette vision commune, celle d’un avenir partagé. L’Union pour la Méditerranée est née du besoin d’une coopération plus équilibrée entre pays méditerranéens, elle est fondée sur des valeurs de liberté et d’équité. En cette période complexe, c’est peut-être une clé, un outil, au service des peuples de Méditerranée. »
La Lettre Méditerranée :
Ahmad Massa’deh, secrétaire général de l’Union pour la Méditerrané vient de démissionner. Connaissez-vous ses raisons ? Après l’annulation du sommet de Barcelone, n’est-ce pas un nouveau coup dur ?
Renaud Muselier :
– » Monsieur Massa’deh a souhaité mettre fin à ses fonctions. C’est une décision personnelle que je ne me permettrai pas de commenter. L’institution, quant à elle, perdure et même si elle doit faire face aujourd’hui à une multiplication de difficultés, je suis convaincu qu’elle va poursuivre son action, s’adapter à cette nouvelle donne… Retrouver un second souffle ! «
La Lettre Méditerranée :
Bloquée par les dissensions arabo-israéliennes, affectée par les mouvements populaires dans les pays arabes… L’Union pour la Méditerrané peut-elle vraiment être relancée ?
Renaud Muselier :
– » Nicolas Sarkozy a réaffirmé, à plusieurs reprises, sa volonté de poursuivre l’action engagée. Le 4 février dernier, lors du Conseil européen, il a encore rappelé que « l’Union pour la Méditerranée était non seulement nécessaire mais indispensable ». De nombreux projets existent qui répondent aux aspirations des peuples méditerranéens en matière d’énergie, de formation, d’actions vers la jeunesse. En tant que Président du Conseil Culturel de l’Union pour la Méditerranée, j’ai également beaucoup d’initiatives en perspective. Toutes poursuivent le même objectif : rapprocher encore davantage les hommes et les femmes du Nord et du Sud de la Méditerranée.