Après avoir été d’ordre purement médiatique, l’affaire du député Abdessamad Idrissi, molesté par la police au cours d’une manifestation non autorisée de diplômés chômeurs à Rabat, est en train de prendre une tournure ouvertement politique.
Surfant probablement sur le succès de la mauvaise aventure du député Abdessamad Idrissi- qui a fait la Une des journaux pendant plusieurs jours de suite- des personnalités politiques de premier plan, dont le chef du gouvernement et le président de la première Chambre du Parlement, ont sauté sur l’occasion, chacun pour servir ses intérêts propres. Mais l’un comme l’autre se sont dressés en farouches défenseurs du parlementaire malmené, envisageant même de lui présenter des excuses au nom du gouvernement. Si la question du parlementaire brutalisé par les forces de l’ordre suscite autant d’intérêt, c’est parce qu’il est membre du PJD, le propre parti du chef du gouvernement, l’islamiste Abdelilah Benkirane. Car depuis le temps où les diplômés au chômage arpentent la célèbre avenue Mohammed V en face du Parlement dans la capitale Rabat, ils ne suscitent plus beaucoup d’émoi dans le Royaume Chérifien. Ils manifestent régulièrement et le plus souvent de manière pacifique sous le regard le plus souvent réprobateur des passants, dont bon nombre se désolidarisent de plus en plus de diplômés chômeurs qui exigent des emplois uniquement dans la fonction publique et refusent les emplois dans le secteur privé. Pourtant, le président de la Chambre des Représentants, Karim Ghellab n’a gardé à l’esprit que l’appartenance politique du député Abdessamad Idrissi. Ghellab, qui est en difficulté au sein de son parti, le très nationaliste Istiqlal, est accusé par ses adversaires de tenter de se rapprocher des islamistes du PJD pour mieux négocier sa position au sein de sa propre formation. Cette conjoncture a été utilisée également par le chef du gouvernement Abdelilah Benkirane, qui y a vu probablement un moyen de diviser l’Istiqlal qui le met sous pression depuis qu’elle s’est dotée d’un nouveau chef, le vibrionnant et très populaire maire de la ville de Fès, Hamid Chabat.
« Autant de manœuvres politiciennes qui font dire aux observateurs que cette course éperdue pour tirer des avantages personnels ou politiques d’un événement somme toute passager, se fait sur le dos des forces de sécurité. »
Certains estiment que ces dernières n’auraient fait que leur travail en dispersant la manifestation au moment où le député y fût présent tout en sachant bien que la marche était interdite.
Ces critiques interviennent aussi dans le sillage du rôle positif qui est quasi-unanimement reconnu aux forces de l’ordre marocaines, dont le calme et la retenue ont évité au pays les dérapages qui se sont produits dans d’autres contrées lors du « printemps arabe ».